Les financements commerciaux sont une composante essentielle du commerce mondial. Ils facilitent la circulation des biens et des services à travers les frontières, et stimulent ainsi la croissance économique et le développement. Malgré ce rôle essentiel, de nombreuses régions du monde connaissent un manque de financements commerciaux, c’est notamment le cas en Afrique, en Asie et dans les Émirats arabes unis (EAU).
Selon certaines estimations, le déficit des financements commerciaux pourrait atteindre 2 500 milliards de dollars d’ici à 20251. Rien qu’en Afrique, le déficit des financements commerciaux est estimé à environ 81 milliards de dollars2.
Aux Émirats arabes unis, un rapport de la Chambre de commerce internationale (CCI) a estimé le déficit des financements commerciaux à 3,3 milliards de dollars en 2020.
Les petites et moyennes entreprises (PME) jouent un rôle important dans la croissance économique, en particulier dans les économies émergentes où elles peuvent représenter jusqu’à 45 % de l’emploi total et 33 % du PIB3. Aux Émirats arabes unis, l’impact des PME sur l’économie locale est encore plus important : les PME représentent près de 95 % de toutes les entreprises opérant dans le pays et contribuent à plus de 60 % du PIB national4.
Bien que les PME jouent un rôle prépondérant dans l’économie de l’Afrique, de l’Asie et des Émirats Arabes Unis, elles sont également confrontées aux plus grandes difficultés d’accès aux services et aux instruments financiers nécessaires au financement du commerce et à la croissance de leurs activités. Combler le déficit des financements commerciaux est une question urgente qui requiert une attention particulière.
Le déficit des financements commerciaux représente un besoin de financement non satisfait. Il s’agit de la différence entre l’argent disponible pour financer les transactions commerciales et ce que les entreprises reçoivent par le biais de lettres de crédit, de prêts commerciaux et d’autres instruments financiers liés au commerce.
En Afrique, en Asie et dans les Émirats arabes unis, le déficit des financements commerciaux peut être attribué à plusieurs facteurs, dont notamment l’accès limité aux financements commerciaux, la faiblesse de l’environnement réglementaire et les mesures de conformité telles que la lutte contre le blanchiment des capitaux (AML), le contrôle des sanctions et les contrôles des exportations.
L’accès limité aux financements commerciaux pose un double problème. De nombreuses institutions financières dans ces régions ne disposent pas de l’infrastructure et de l’expertise nécessaires pour fournir des services de financements commerciaux à leurs clients. Et comme les PME représentent une part importante du marché des financements commerciaux, ce sont elles qui sont le plus durement touchées.
Les PME sont considérées comme présentant un risque plus élevé car elles ne disposent généralement pas des ressources, des garanties et des antécédents de crédit nécessaires pour obtenir un financement commercial. En conséquence, les PME représentent une part disproportionnée des rejets de financements commerciaux, en particulier pour les entreprises dirigées par des femmes où jusqu’à 70 %5 des demandes de financements commerciaux sont soit partiellement, soit totalement rejetées.
La faiblesse de l’environnement réglementaire est un autre problème qui exacerbe l’accès aux services financiers et contribue ainsi à creuser le déficit des financements commerciaux. Des cadres juridiques et des mécanismes d’application inadéquats peuvent créer un manque de confiance et de transparence dans le secteur financier, ce qui augmente le risque perçu et rend difficile pour les institutions financières d’établir des relations de correspondance bancaire, d’opérer efficacement et de fournir des services commerciaux à leurs clients.
Les mesures liées à la mise en conformité ont également un impact sur le déficit des financements commerciaux. Outre le respect des réglementations relatives à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, les institutions financières subissent de plus en plus de pression pour assurer leur conformité avec des sanctions et des contrôles des exportations en constante évolution. Le non-respect de ces règles peut entraîner des sanctions sévères et une potentielle atteinte à leur réputation.
Les sanctions sont des mesures imposées par les gouvernements pour restreindre le commerce avec des pays, des individus ou des entités spécifiques afin d’atteindre des objectifs de politique étrangère. Les contrôles des exportations sont des mesures qui réglementent l’exportation de biens et de technologies sensibles afin d’éviter qu’ils ne tombent entre de mauvaises mains.
Si ces mesures peuvent être efficaces pour atteindre les objectifs visés, elles peuvent également avoir des conséquences inattendues sur les financements commerciaux en Afrique, en Asie et dans les Émirats Arabes Unis. Les étapes de mise en conformité supplémentaires entraînent des retards et augmentent les coûts liés au commerce, ce qui rend encore plus difficile pour les PME de financer leurs activités commerciales, de gérer leur trésorerie et d’être compétitives.
Néanmoins, il est essentiel de respecter les règles de mise en conformité. Les pays dont l’infrastructure réglementaire est faible et dont la mise en conformité présente des lacunes sont susceptibles d’être placés sur la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), ce qui peut créer une série de difficultés qui creusent encore davantage le déficit des financements commerciaux dans les pays concernés.
Le GAFI est un organisme intergouvernemental qui fixe des normes internationales pour les mesures de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Lorsqu’un pays est placé sur la liste grise du GAFI, cela signifie que l’on estime que ce pays présente des lacunes importantes dans son régime de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, et qu’il fait l’objet d’une surveillance et d’une vigilance accrues. Le fait d’être placé sur la liste grise peut être un « cadeau empoisonné » pour les pays touchés qui sont déjà aux prises avec des économies fragiles et d’importants déficits de financements commerciaux.
Les institutions financières hésitent souvent à fournir des services de financements commerciaux à des clients situés dans des pays figurant sur la liste grise en raison du risque plus élevé, ce qui rend l’accès au financement plus difficile pour les PME. En outre, les pays figurant sur la liste grise du GAFI sont susceptibles d’être confrontés à :
Bien que les mesures de conformité puissent créer des obstacles qui augmentent les coûts et rendent plus difficile l’accès des PME aux instruments financiers nécessaires pour les financements commerciaux, le respect des obligations concernant la conformité peut également avoir un impact positif.
L’adhésion aux normes internationales de conformité facilite le commerce transfrontalier en fournissant un cadre pour la conduite des affaires en toute sécurité. Les mesures de conformité peuvent contribuer à réduire le risque associé aux transactions de financements commerciaux, ce qui permet aux institutions financières d’opérer plus facilement au-delà des frontières et de fournir des services de financements commerciaux à un public plus large.
La connaissance du client (KYC) et d’autres exigences de conformité permettent aux institutions financières de mieux comprendre leurs clients et leurs activités commerciales, ce qui réduit encore le risque de fraude et d’autres activités illicites. En instaurant des exigences simplifiées sur la connaissance du client et d’autres mesures de conformité adaptées aux PME, les institutions financières peuvent favoriser l’inclusion financière et permettre ainsi à ces entreprises d’avoir accès au crédit dont elles ont besoin pour financer leurs activités commerciales.
En Afrique, en Asie et dans les Émirats Arabes Unis, la confiance est un élément essentiel pour réaliser des activités commerciales. En appliquant des mesures solides de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, ainsi que des sanctions et des contrôles des exportations fiables, les institutions financières instaurent la confiance et renforcent ainsi la relation entre l’institution et ses clients. Cela permet en retour de développer l’activité commerciale.
L’accès limité aux services financiers, la faiblesse de l’environnement réglementaire, les mesures liées à la conformité, les sanctions et les contrôles des exportations sont des facteurs clés qui contribuent au déficit des financements commerciaux en Afrique, en Asie et dans les Émirats Arabes Unis.
La réduction de ce déficit est une question complexe qui nécessite une approche multidimensionnelle afin de relever les différents défis. En adoptant des programmes de conformité solides, les institutions financières peuvent contribuer à soutenir les financements commerciaux pour les PME, ce qui est essentiel pour la croissance économique et le développement.
Dans le même temps, les mesures de conformité contribuent à renforcer les relations avec les clients et à instaurer la confiance, qui est le fondement de l’activité commerciale dans ces régions.
1Chambre de commerce internationale. (n.d.). La Chambre de commerce internationale et Finastra s’associent pour combler le déficit des financements commerciaux. Extrait du 18 juin 2023, tiré de https://iccwbo.org/news-publications/news/international-chamber-of-commerce-and-finastra-team-up-to-tackle-the-trade-finance-gap/
2Banque africaine de développement. (n.d.). Selon un rapport, à la suite de la COVID-19, l’Afrique a besoin d’un coup de pouce urgent en matière de financements commerciaux. Extrait du 18 juin 2023, tiré de https://www.afdb.org/en/news-and-events/press-releases/africa-needs-urgent-trade-finance-boost-wake-covid-19-report-finds-37925
3Organisation de coopération et de développement économiques. (n.d.). Les PME sont la clé d’une croissance plus inclusive. Extrait du 18 juin 2023, tiré de https://www.oecd-ilibrary.org/economics/smes-are-key-for-more-inclusive-growth_25aa3d56-en;jsessionid=HDe6kZkTyv_S1yq3DfNHF2YblWwOniBckem9PRFr.ip-10-240-5-97
4AGBI. (n.d.). DP World et les PME : déficit de financements commerciaux. Extrait du 18 juin 2023, tiré de https://www.agbi.com/articles/dp-world-smes-trade-finance-gap/
5Banque asiatique de développement. (n.d.). Réponses à vos questions : qu’est-ce que le déficit des financements commerciaux et pourquoi est-ce important ? Extrait du 18 juin 2023, tiré de https://blogs.adb.org/blog/your-questions-answered-what-trade-finance-gap-and-why-does-it-matter
6Deloitte. (n.d.). Liste grise : comprendre ses implications pour les institutions financières. Extrait du 18 juin 2023, tiré de https://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/za/Documents/risk/za_Greylisting.pdf
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